Des colères infructueuses aux marchés bien conclus

Publié le 30 Mars 2007


" A la suite d’une série de consultations, et de l’ouverture marquée par les partis libéral et radical, le Conseil communal de la Ville de La Chaux-de-Fonds a trouvé un accord avec plusieurs groupes politiques du Conseil général. Celui-ci prévoit l’abandon du projet de référendum par l’UDC et la décision de l’Exécutif de demander  au législatif d’annuler l’arrêté autorisant  le réaménagement de la rue du Collège-Industriel. Le Conseil communal, en contre-partie, a obtenu de ces groupes l’engagement de soutenir le projet d’aménagement de la Place du Marché. Ainsi, la dynamique visant à valoriser l’espace urbain au centre-ville reste entière. Les autorités de la Ville échappent à un blocage qui aurait mis en danger d’autres projets ultérieurs et pénalisé l’effort de revalorisation du centre. "



Tel est le communiqué publié aujourd’hui à 11 h. 00 par le Conseil communal. Il met fin à l’une des semaines les plus difficiles de la législature qui mérite une analyse. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, ce n’est pas que la gauche qui doit faire marche arrière mais tous les partis et le Conseil communal. Et, paradoxe heureux, ces marches arrière sont un succès pour la ville et pour chaque composante politique.

Ces événements mettent en évidence la difficulté de faire de la politique de milice, avec des élus encore bien inexpérimentés (dont je suis) qui ont de la peine à s’adapter à des situations où le dialogue, les décisions rapides, le flair politique et les intérêts général et particulier doivent s’accorder.

Du côté du Conseil communal, comprenons l’impatience qu’il avait à présenter enfin un projet facilement réalisable, prélude à d’autres plus ambitieux. L’erreur a été de croire qu’un projet de 350'000 francs, proposé au vote sans véritable consultation préalable, n’amènerait pas de referendum. Une porte de sortie aurait été lundi, lors de la séance du Conseil général, d’accepter de renvoyer le projet en commission. La sagesse a été hier d’inviter les libéraux à une réunion pour débloquer la situation : nous retirons le projet et nous mettons en route le réaménagement de la place du Marché. Sinon, tout était compromis pour plusieurs années.

Du côté de l’UDC, comprenons l’agacement de devoir voter un projet sans connaître précisément la teneur et le coût des autres. L’erreur a été d’intervenir aussi brutalement avec la menace d’un referendum, ce qui bloquait toute discussion possible, d’autant que la gauche n’avait aucune information préalable sur ce coup politique. La sagesse a été hier soir de faire confiance au Conseil communal et de comprendre que lancer un referendum était un immense gaspillage d’énergies : récolter encore des signatures, faire une campagne, organiser une votation coûteuse. Sinon, ce parti serait passé pour un Neinsager systématique et, paradoxalement, aussi un gaspilleur.

Du côté des libéraux-radicaux, comprenons leur souci d’ouverture vu leur intérêt à revaloriser l’urbanisme de la ville. Deux motions libérales de 2005 sur les réaménagements des places du Marché et de la Gare sont toujours sur le bureau du Conseil communal. L’erreur a été de proposer un réaménagement de la rue Collège-Industriel pour une somme ridicule de 50'000 francs, ce qui rendait difficile un accord avec la gauche. Une porte de sortie aurait été lundi, lors de la séance du Conseil général, de monter à 150'000 francs et de convaincre l’UDC, ce qui aurait fait boule de neige avec la gauche. La sagesse a été hier d’accepter la rencontre avec le CC et, dans une assemblée générale extraordinaire, d’entériner le compromis. Sinon, c'était encore plus se faire phagocyter par l'UDC.

Du côté de la gauche, comprenons la volonté de soutenir l’exécutif et d’enfin voter un crédit pour les piétons. L’erreur a été de camper sur des positions de principes décidées par avance alors que libéraux avait dès vendredi par courriel informé de leur ouverture. Une porte de sortie aurait été lundi, lors de la séance du Conseil général, de proposer un renvoi en commission ou une suspension de séance pour faire le point ensemble. La sagesse est dès maintenant de comprendre qu’un projet urbanistique n’a de chance dans notre ville que si tous les partis sont d’accord et si la population est globalement favorable, en particulier les automobilistes et les commerçants. Sinon, c'est continuer à se draper dans le manteau de la certitude majoritaire et courir à des échecs répétés.

Ainsi, dans un subtil (et éprouvant pour les nerfs) jeu de rapports de force, on arrive à un résultat qui devrait satisfaire tout le monde; y trouvent leur compte l’intérêt général surtout mais aussi l’intêrêt particulier puisque chaque partie peut dire avoir tiré bénéfice des erreurs commises :

- Le Conseil communal qui se montre autocritique, lucide sur les dangers et ouvert au déblocage (à la différence du précédent Conseil de la législature 2000-2004).

- L’UDC qui fait, c’est son terrain, de l’opposition systématique mais finalement constructive.

- Le centre-droit qui, plutôt que d'être l’otage d’un referendum annoncé, peut se targuer d’avoir créé l’ouverture.

- La gauche enfin, qui peut affirmer avoir mis d'emblée en avant l'importance de remettre la machine en route en matière d'aménagements et d'urbanisme, et qui obtient ce qu'elle a voulu marquer avec le projet de Collège-Industriel : on peut à nouveau envisager de faire quelque chose pour changer le visage de cette ville.

Abandonnons donc la rue des colères infructueuses et faisons la place à des marchés bien conclus.

Rédigé par Daniel Musy

Publié dans #Urbanisme et environnement

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